daï ! #2
The elephant in the room
Israël est un sujet paradoxal chez Golem. Les membres de Golem entrent en rapport avec Israël de manières si diverses que le consensus est souvent difficile, puisque c’est la question de l’antisémisitisme ici et maintenant qui a présidé à la création de ce collectif. Y coexistent des rapports affectifs, de déférence comme des rapports de méfiance.
Par ailleurs, beaucoup affectent une neutralité ou une distance vis-à-vis d’Israël, une velléité de ne pas avoir de rapport avec Israël, de ne pas être enjoint de prendre position — les injonctions sont toujours désagréables. Et la guerre continuée à Gaza suscite un malaise tel que tous les débats internes achoppent dessus.
Peut-on n’être ni sioniste, ni antisioniste ? Oui répond Paul Djedj. Selon lui, les Juifs de diaspora ont désormais besoin de penser le banal, c’est-à-dire de normaliser leurs relations vis-à-vis de l’État d’Israël et de déconstruire les mythes qui les entravent.
Alors que le vocable sioniste est devenu un « litmus test » voire une insulte, Choham Sudre estime que penser rompre le lien avec Sion, et son émanation contemporaine, l’État d’Israël, est un non-sens pour le judaïsme. Pour ce faire, elle propose un long retour historique sur l’ancrage du judaïsme en terre d’Israël, ainsi que l’aspiration à Sion en diaspora, et donne un sens au sionisme aujourd’hui, après 1948, et en diaspora.
Document. Dans un texte très touchant l’écrivain israëlien Amos Oz explore les liens qu’il se sent avoir avec le reste du corps juif. Il ne peut se défaire de ce peuple comme on ne peut se défaire d’une partie de soi, de sa famille ou de son histoire. L’amour cohabite avec la haine dans sa maladie juive.
Sionisme ou diasporisme ? Et si ces deux approches de la judéité pouvaient se conjuguer ensemble. C’est ce qu’illustre Damien Fabre, journaliste et doctorant en histoire, avec le cas méconnu du mouvement sépharadiste, qui s’était développé au début du XXe siècle dans les communautés sépharades de Grèce et des Balkans.
Dans ce témoignage, Emma revient sur son ressenti de jeune française non-juive lors de son expatriation en Israël, sa découverte du judaïsme, d’une histoire métissée et complexe. Premières prises de conscience qui lui reviennent après le 7 octobre. Elle s’interroge alors sur l’antisémitisme et les formes pernicieuses qu’il peut prendre dans certains milieux politiques. Le rencontrer dans des espaces de gauche, féministes, écologistes lui fait l’effet d’une douche froide.
Dans le précédent numéro, Lisa Hazan portait un regard inquiet sur le conflit israélo-palestinien qui semble sans issue et se posait la question « jusqu’à quand ? ». Aujourd’hui, elle part à la rencontre de Mauricio Lapchik, un des portes-paroles de La Paix Maintenant, Shalom Ahshav, mouvement sioniste de gauche. Ils veulent y croire maintenant, en implémentant la solution à deux États : contre l’occupation, pour la création d’un État palestinien aux côtés d’Israël.
TW : un des témoignages dans cet article relate des faits de violence ayant eu lieu le 7 octobre qui peuvent heurter certaines personnes.
Au printemps 2023, des milliers de réservistes refusaient publiquement d’honorer leurs missions pour protester contre la réforme judiciaire. Ce mouvement d’objection de conscience pour la démocratie a été brutalement interrompu par l’attaque du Hamas le 7 octobre et l’entrée en guerre d’Israël qui l’a suivie.
Avec la poursuite de la guerre et les crimes de guerre qu’elle entraîne, l’objection de conscience comme moyen de lutte contre l’occupation et la colonisation des territoires depuis la guerre de 1967 est réapparue sur la scène politique avec la déclaration de refus de Tal Mitnick en décembre dernier. Dans cet article, Fabienne Messica, sociologue, membre du Comité National de la Ligue des droits de l'Homme (LDH) et co-autrice avec Tamir Tsorek d’un ouvrage sur les refuzniks retrace succinctement l’histoire de ce mouvement qui refuse l’occupation.
Le Hamas est-il antisémite ? Le 7 octobre est-il un massacre antisémite ? Ces évidences ont été niées ces derniers mois par les groupes antisionistes, peut-être pour ne pas avoir à faire l’examen de leurs réactions aux massacres du 7 octobre. Héléna Muzi Cohen et Nathanaël Uhl se proposent ici de ne pas simplement admettre cette évidence, mais de la démontrer inlassablement, en revenant dans le détail aux textes fondamentaux et à l’idéologie des responsables du 7 octobre.
La guerre menée par Israël à Gaza a été critiquée en faisant appel à ce qui serait le « fondement ancestral » de l’Etat hébreu : la « loi du Talion ». Dans cet article, Julien Chanet retrace les origines historiques et les usages contemporains de la loi du Talion pour déployer une réflexion sur l’antisémitisme, l’antijudaïsme et l’antisionisme.
À rebours des craintes d’une importation du conflit israélo-palestinien en France, en particulier à l’École, Théo Cohen témoigne d’une réalité de terrain bien plus nuancée où les élèves font davantage preuve de curiosité intellectuelle que de discours de haine. Il nous explique comment la démarche Parallel Histories encourage un recul critique sur nos propres perceptions et permet la construction des savoirs par le dialogue. En ce sens, il soutient que l’enseignement du conflit israélo-palestinien peut être une étape clé de la construction citoyenne des élèves.
Maëva Journo revient sur les élections législatives de juin-juillet. Elle a voté NFP, sans pouvoir imaginer d’autre choix. Et pourtant, cette évidence butait sur quelque chose : comme juive, elle vivait là un conflit de loyauté. La lutte contre l'antisémitisme demeurant un point d'achoppement.
La scène humoristique française a bien changé en 40 ans et semble évoluer vers un rire moins moqueur, moins misogyne et moins raciste. Pourtant, les artistes échouent parfois à faire apparaître leur « pacte humoristique » et peuvent heurter le public. Emmanuel Sanders explore ici le malaise que peut ressentir le public juif devant une scène de théâtre à travers le cas de Dieudonné et de ses héritier•es, puis nous montre aussi qu’il est tout à fait possible de rire avec les juifves (et non à leur dépend) et de parler de Gaza et de la politique israélienne sur scène sans nourrir l’antisémitisme.
Dans le précédent numéro, Alicia Herz rendait compte de la distance que le 7 octobre avait fait naître dans son cercle amical. Mais une petite musique trottait : et si j’exagérais ? se demandait-elle. Dans ce numéro, elle rumine ce sentiment d’exagération, se demande si elle n’est pas paranoïaque, et offre une réflexion stimulante sur la paranoïa chez les Juifs.
De quoi la kémia est-elle le nom ? Elle désigne la multitude de hors-d'œuvre servis à l’apéritif en Afrique du Nord. Dans les familles juives, ce terme et cette profusion de salades sont associés aux soirées de shabbat : il peut évoquer les collations que l’on partage à la synagogue après l’office ou le ballet des entrées qui précède en général un ou deux plats chauds. Lola Zerbib-Kahanne nous en propose trois recettes.