La gauche et l’antisémitisme : retour sur un impensé avec Misrahi
Rivka DLB / Illustrations : Mathilde Roussillat Sicsic
Ce numéro s’interroge d’abord et avant tout sur le rapport des Juifs à la gauche, mais nous ne pouvons faire l’économie de la réciproque, celui du rapport de la gauche aux Juifs. La question de l’antisémitisme de/à gauche est aujourd’hui devenue un lieu commun, depuis la mainmise de la France insoumise sur ce camp politique. Rivka DLB nous propose d’y réfléchir sur le temps long, en revenant à Marx, et nous offre une lecture critique de la Question juive de Marx de Robert Misrahi. L’antisémitisme qui prospère à gauche tient-il de sa lecture économique du monde et du fait juif ? Quelle préposition utiliser, antisémitisme « de » gauche ou « à » gauche ? Voilà ce à quoi elle se propose de répondre.
Actualité de Misrahi
Depuis le 7 octobre, on a vu resurgir sur le devant de la scène la présence de cette « question juive » à gauche, à travers les notions antithétiques de « sionisme » et d’ « antisionisme ». D’un côté comme de l’autre, on s’est mis à adopter des positions intenables pour être « du bon côté de l’histoire » ou suivant un agenda politique qui dépasse largement le conflit qui s’en est suivi. Aussi ai-je été choquée du manque d’empathie d’une certaine partie de la gauche radicale au lendemain du pogrom du 7 octobre et de son ambivalence à l’égard du Hamas au nom d’une lutte décoloniale où Israël incarnerait un projet impérialiste et colonial.
Comme le disait en son temps Adorno, « la tâche, quasiment impossible à résoudre, est de ne pas se laisser rendre bête ni par la puissance des autres, ni par sa propre impuissance »¹. Il ne s’agit plus tant de penser le nazisme, mais plutôt de questionner la présence d’une pensée haineuse et anti-humaniste au sein de partis qui prônent pourtant l’universalisme des valeurs humanistes. Parce qu’il a osé affronter ce que son époque considérait comme une « dénégation à gauche » (p. 15), à savoir « l’antisémitisme de gauche », le livre de Misrahi de 1972, Marx et la question juive², a peut-être encore quelque chose à nous dire aujourd’hui. Tout d’abord, ce que l’auteur appelle « l’antisémitisme de gauche » revêt plusieurs caractéristiques : clandestin, il semble en théorie impossible, puisqu’il contredit les principes mêmes de la gauche. Mais ce qui est contradictoire n’est pas pour autant impossible. C’est pourquoi Misrahi entend s’y attaquer, à l’aide d'une critique radicale, qui l'amène à remonter à la source même de l’idéologie de gauche, à savoir le marxisme, et avant tout Marx lui-même et son article de 1844, « Sur la question juive »³. Cet article avait été publié en réponse à l’intellectuel socialiste hégélien allemand Bruno Bauer qui, s’étant lui-même penché sur ce sujet, avait produit un texte indéniablement antisémite. Et, ajoute Misrahi, l’antisémitisme du texte de Marx n’a pas affecté le marxisme dans son ensemble. Nous verrons plus loin ce qu’il en est.
Parmi toutes les raisons qui m’ont poussée à revenir à ce livre, je retiens avant tout le problème posé par Misrahi et que je reformule sous la forme de deux questions : la « question juive » demeure-t-elle pertinente, en tant qu’elle mettrait au jour un impensé, celui de la manière dont la gauche pense le judaïsme dans nos sociétés contemporaines, prenant aussi bien en compte les Juifs en diaspora que l’État d’Israël ? Et comment la gauche a-t-elle intégré les Juifs dans la lutte des classes ?
Ces questions conduisent à revenir sur l’articulation entre gauche et antisémitisme, articulation qui, encore aujourd’hui, reste un sujet peu présent dans les études historiques et philosophiques sur la gauche. Avec Misrahi, il s’agit ainsi de mettre des mots sur un impensé, qui s’apparenterait plutôt à une aporie, et, à l’aide de la raison, le combattre efficacement.
En outre, de ma lecture, deux nouvelles questions ont émergé : existe-t-il un antisémitisme qui lui serait propre, inhérent au socialisme et au communisme ? Ou bien ne serait-il qu’accidentel, présent chez des personnes de gauche, mais d’une manière inconsistante et tronquée, comme si, intrinsèquement, la gauche ne pouvait pas être antisémite ? Pour le dire autrement, existe-t-il un antisémitisme de gauche, ou bien à gauche ?
Avant d’entamer une lecture critique du livre de Misrahi, résumons-le en quelques mots. Marx et la question juive cherche à décrypter les ambiguïtés philosophiques et historiques du rapport entre la gauche et ce que l’on appelle « la question juive ». En s'attaquant à l’analyse du texte célèbre de Karl Marx, « Sur la question juive », Misrahi offre une lecture approfondie et critique d’un épisode souvent controversé de la pensée marxienne. Mais elle a ses limites : j’y reviendrai plus loin.
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« Sur la question juive » : un texte antisémite
Son premier chapitre offre une analyse comparative de Marx et de Bauer. Cette analyse permet à l’auteur de faire ressortir plusieurs caractéristiques de ce qu’il affirme être l’antisémitisme de Marx : 1. Celui-ci fait abstraction des persécutions subies par les Juifs, dans l’Histoire et, plus récemment pour lui, lors du pogrom de 1819. Marx réécrit l’histoire des Juifs en omettant leur statut de minorité opprimée. 2. Le judaïsme, chez Bauer comme chez Marx, est réduit à une religion et la question juive est réduite à une question religieuse, au point que Marx affirme que « l’humanité doit se libérer des juifs » (p. 43). Autrement dit, pour l’un comme pour l'autre, le judaïsme est n’est qu’une religion et c’est à ce titre qu’il doit être supprimé.
Ce point est développé dans le chapitre suivant, dans lequel Misrahi analyse sans concession la définition marxienne du judaïsme comme religion. Citant à plusieurs reprises le texte de 1844, il précise que c’est là où Marx innove. Sa définition s’appuie en effet sur ce qu’il appelle le « juif réel », c’est-à-dire celui de la « vie civile » (p. 47), fruit d’une méthode pseudo-empiriste qui ne se contente pas du contenu doctrinal et rituel, ni même culturel, propre au judaïsme. Notons également que le judaïsme est réduit à un tout homogène, tout comme l’est le Juif. Or, en prétendant étudier le « juif réel » pour découvrir la nature et l’essence du Juif, Marx reprend à son compte l’essentialisation des Juifs chargée des préjugés haineux multiséculaires, tout en les réactualisant dans le contexte de la révolution industrielle du XIXe siècle. Plus précisément, aux yeux de l’auteur du Capital, le judaïsme a pour essence « le besoin pratique, l’égoïsme », en d’autres mots, le besoin matériel (p. 47). Misrahi commente le raisonnement de Marx en indiquant que ce dernier identifie la superstructure (la religion juive) et l’infrastructure (la vie matérielle). Autrement dit « il affirme que la religion est la vie même des juifs, leur essence et leur définition, et que cette essence religieuse (c’est-à-dire la totalité du judaïsme) est la manifestation (ou le phénomène) de l’activité essentielle et fondamentale des juifs, le trafic » (p. 49). En tant que religion, le judaïsme est donc défini par l’argent, car « l’argent est le dieu des juifs » (p. 49). Partant, ce à quoi aboutit le raisonnement de Marx, c’est à une définition du judaïsme qui peint un portrait du Juif entraînant « la réprobation générale des socialistes » (p. 49), puisqu’il est réduit à l’argent (p. 49), puis, identifié à la bourgeoisie (p. 50). Au fond, il s’agit de réduire le peuple juif à une minorité irréductible, à un « peuple-classe »⁴, et plus précisément à la bourgeoisie. Or, comme le rappelle Misrahi (p. 50), la bourgeoisie est l’antagonisme du socialisme. La dialectique marxienne expliquerait alors pourquoi la minorité juive serait exclue du prolétariat : « 1. Le judaïsme c’est l’argent. L’argent, c’est la bourgeoisie. 2. Or, la bourgeoisie doit être détruite. 3. Donc, il faut supprimer le judaïsme ».
Il n’y a bien évidemment rien d’empirique dans une définition de l’essence du judaïsme qui, loin de s’appuyer sur l’observation, ne fait que recourir à une « pensée magique » qui « affirme, hors de toute argumentation rationnelle, l'existence d’une essence substantielle unique et maléfique permettant de définir un groupe social concret » (p. 52). Chose cruciale dans l’analyse de Misrahi : une telle définition du judaïsme ne vient pas de nulle part. En effet, Marx reprend à son compte les mythes nauséabonds de « l’antisémitisme chrétien »⁵ (pp. 106-107), nés avec les Pères de l’Église, et dominant l’Europe à partir de la première croisade. Plus que de les reprendre, il les réactive dans une théorie socio-économique qui vise à bâtir une nouvelle société en réponse à la violence et à l’oppression propre à la condition ouvrière. Partant, en étant associés à l’argent et à la bourgeoisie, en un mot, au capitalisme, les Juifs sont désignés coupables de l’aliénation des ouvriers par le travail et de la société par l’argent. Les Juifs sont alors les antagonistes du socialisme en tant qu’ils sont une minorité qui ne peut pas, par son essence, appartenir au prolétariat. Sous la plume de Marx, on retrouve au sein d’une théorie socialiste l’imagerie de droite, celle qui était décrite dans le premier chapitre du livre de Misrahi, et qui fait du Juif un étranger oppresseur. On retrouve plus largement de nombreux tropes antisémites propres au XIXᵉ siècle, et qui se retrouvaient dans les caricatures antisémites qui parcouraient les pages des journaux de la Libre Parole d’Édouard Drumont. Le bouc-émissaire est désigné, c’est pourquoi notre auteur sonne l’alerte et conclut que l’article de Marx est un « appel au meurtre, un appel au génocide » (p. 62), ne serait-ce que par assimilation, au moyen de laquelle le judaïsme en tant que religion serait supprimé, sans pour autant préciser ce qu’il adviendrait de ses membres.
Sauver le marxisme : un antisémitisme contingent
Dans la deuxième partie du livre, Misrahi se tourne vers le marxisme. L’enjeu est de taille : il s’agit de savoir si le marxisme, en tant que courant, voire comme idéologie politique, est intrinsèquement antisémite. Pour cela, l’auteur compare le premier chapitre de « Sur la question juive » à un autre texte de la même année, connu sous le nom des Manuscrits de 1844. Dans ce dernier, force est de constater que le terme « juif » et toute référence au judaïsme ont disparu. On retrouve à la place une dialectique marxiste traditionnelle. L’auteur explique cela par une possible universalisation de la question juive, sans dire en quoi cela atténuerait les accusations d’antisémitisme à l’égard de Marx. La bourgeoisie est dépouillée des particularités juives fantasmatiques, ce qui laisse alors penser que « Sur la question juive » aurait été une passade, un moment cathartique permettant à Marx de purger une culpabilité sur laquelle je reviendrai dans la troisième partie.
Dans le chapitre 2, Misrahi poursuit sa démonstration du « caractère non marxiste de l'antisémitisme de Marx » (p. 92), en mettant en évidence l’écart entre le réel et les analyses de ce dernier, à rebours de la méthode marxiste. En effet, comme il le résume d'ailleurs au début de la partie suivante, l’antisémitisme de Marx n’a rien de marxiste, puisque, dans son texte infamant, il n’applique nullement la méthode du matérialisme historique qui refuse « de poser des essences éternelles pour définir un groupe humain et son histoire. » (p. 135). Or, c’est tout le contraire qu’il fait dans « Sur la question juive », lorsqu’il se livre à des élucubrations qui ne s’appuient sur aucun fait ni aucune donnée concrète. En dépeignant son « juif réel » comme un bourgeois dominant, Marx ignore (volontairement ou non) le fait que l’acte d’émancipation des Juifs du 11 mars 1812 dans le royaume de Prusse (par lequel ils accèdent enfin à la citoyenneté) est précaire. L’assimilation n’était souvent réelle qu’à travers une conversion au luthéranisme. Surtout, les « Émeutes Hep Hep » de 1819⁶ montrent que l’oppression et les persécutions demeurent. L’œuvre des maskilim⁷ est loin d’être remplie. Marx est donc révisionniste avec l’histoire des Juifs d’Allemagne, c’est-à-dire avec sa propre histoire.
Par ailleurs, comme le rappelle Misrahi, dans la première moitié de l’année 1842, les polémiques et la question de l’émancipation continuent d’animer la société prussienne, au point que le judaïsme est réduit à ne devenir qu’une simple religion, religion de laquelle on peut se défaire par la conversion. Marx serait donc tributaire du monde dans lequel il évoluait. Autrement dit, son antisémitisme serait à l’image de celui des sociétés dans lesquelles il a vécu, en Allemagne, mais aussi en France où il a rédigé « Sur la question juive ». Le chapitre se termine en faisant un parallèle avec la situation réelle des Juifs de France, où ils sont émancipés depuis 1791. Comme c’était le cas pour les Juifs d’Allemagne, les Juifs de France sont essentialisés et réduits à « un amalgame de contrevérités suscitées par le schéma chrétien du juif étranger, exilé, voyageur improductif, être maudit voué au mal c’est-à-dire à l’exploitation du sang chrétien » (p. 106). Sous la plume de Marx cela prend la forme d’un groupe homogène qu’est la bourgeoisie, ce qui, en conséquence, les exclut de facto du prolétariat⁸ (p. 106).
Au terme de cette deuxième partie, Misrahi résume le raisonnement antisémite de Marx :
« Le mythe antisémite de Marx repose essentiellement sur trois affirmations : 1. Le Judaïsme est par essence une religion, et celle-ci est essentiellement une religion de l’argent. 2. Les juifs sont par essence cosmopolites et étrangers. 3. Ils forment une classe commerçante et ne se constituent jamais comme prolétariat mais toujours comme bourgeoisie. » (p. 108)
Dès lors, pour sauver le marxisme, s’il faut chercher une explication à l’antisémitisme de Marx, il faut la chercher non pas dans le marxisme, mais dans des causes extérieures, dans la société européenne du XIXᵉ siècle et dans l’histoire personnelle de Marx.
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La cause de l’antisémitisme de Marx, « c’est Marx lui-même »
La troisième et dernière partie permet à Misrahi de poursuivre sa purification du marxisme par une réduction de l'antisémitisme de Marx à « une étape purement négative de sa pensée », à une « crise […], un bref éclatement contradictoire par rapport à l’ensemble de la doctrine marxiste et du projet général de Marx » (p. 136).
Le premier chapitre de cette partie décrit avec précision le contexte historique dans lequel l’antisémitisme, quoique non permanent et non généralisé, reste un élément important de la société allemande, depuis l’Aufklärung (les Lumières allemandes), jusqu’à l’idéalisme. Autrement dit, c’est une grande partie de la philosophie allemande des XVIIIᵉ et XIXᵉ siècles qui est visée (pas toute, car Gotthold Lessing, ami de Moses Mendelssohn, ou encore Christian Wilhelm Dohm ou Johann Georg Hamann sont philosémites et ont eu des rôles moteurs dans l’émancipation des Juifs). S’il n’est pas une fatalité, l’antisémitisme n’en est pas moins présent chez des philosophes que l’historiographie traditionnelle érige au rang des grands penseurs, tels que Kant, Fichte ou Hegel. Cette analyse a le mérite de montrer que l'antisémitisme a toute sa place dans les universités allemandes et que son influence dépasse le Rhin pour irriguer de nombreux penseurs du socialisme français du XIXᵉ, tels qu’Alphonse Toussenel ou Pierre-Joseph Proudhon. Les héritiers des Lumières baignent donc dans une culture antisémite, et Marx ne fait pas exception. La métaphysique allemande n'est ainsi pas épargnée, car, sous la plume d’Ernst-Moritz Arndt ou de Julius Friedrich Stahl, elle est avant tout chrétienne, ce qui signifie l’exclusion d'un universel qui intègrerait le judaïsme. En conséquence, l’étude de Misrahi montre que l’« antisémitisme chrétien », traditionnellement théologique, entre dans la philosophie. De surcroît, en faisant du christianisme la religion germanique, ces auteurs peuvent sans vergogne affirmer que les Juifs ne peuvent pas s’intégrer dans la société chrétienne allemande au motif qu’ils ne reconnaissent ni le Christ ni le christianisme qui sont pourtant au fondement de l’État (p.170). Pour Misrahi, Marx s’inscrit dans le sillage de ces auteurs (p. 174).
La France n’est pas non plus épargnée. L’auteur propose l’une des rares études de l'antisémitisme chez les socialistes Charles Fourier, Toussenel et Proudhon. Il ne s’agit pas de renvoyer dos-à-dos le socialisme et les politiques réactionnaires d’extrême-droite, mais plutôt de mettre en lumière la prégnance de l’« antisémitisme chrétien » (p. 176) au sein du premier socialisme français. Plus précisément, à travers ces socialistes antisémites, Misrahi cherche à démontrer qu’il s’agit d’un « antisémitisme théologique » et que, « pas plus que Marx n’est antisémite parce qu’il est marxiste (il est antimarxiste dans « Sur la question juive »), Fourier n'est pas antisémite parce qu’il est socialiste : son antisémitisme a des sources culturelles chrétiennes, et des sources psychologiques pathologiques » (p. 186). On comprend donc que s’il y a de l’antisémitisme à gauche, celui-ci prend sa source dans un « christianisme archaïque » actualisé dans une logique économique (p. 186). Même chez Proudhon, l’antisémitisme a une origine chrétienne, puisqu’il reprend à son compte le mythe du Juif usurier et spoliateur (p. 199). Cette logique permet surtout d’exclure à nouveau les Juifs du prolétariat, puisqu’ils ne sont pas chrétiens (p. 190).
Pourtant, afin d’exonérer le socialisme français de tout antisémitisme intrinsèque (ce point sera discuté plus loin), Misrahi présente la pensée de deux socialistes chrétiens non antisémites, à savoir : Constantin Pecqueur et Étienne Cabet. Ici, Misrahi avance une thèse singulièrement intéressante, fondée sur les concepts de libre arbitre et de responsabilité : « il est nécessaire de conclure que l’antisémitisme (ou son refus) est le fait d’un choix dont il faut tenir le penseur pour responsable » (p. 204). Autrement dit, l’antisémitisme n’est ni une fatalité ni une détermination due au contexte socio-historique : sa présence dans une pensée, aussi élaborée soit-elle, est le résultat d’un choix et leurs auteurs en sont les seuls responsables. Par exemple, l’utopisme socialiste n'a en soi rien d’antisémite car, en dépit des salves haineuses de Charles Fourier, Étienne Cabet a su développer une pensée, elle-même utopiste, dans laquelle on retrouve plusieurs pages philosémites (p. 211). Et l’auteur de conclure son chapitre en rappelant que « l’émancipation des juifs, loin d’être, comme pour Marx, la suppression des juifs, est bien plutôt avec Cabet, l’émancipation politique et sociale de l’humanité entière et des juifs avec elle » (p. 216).
Si l’antisémitisme résulte donc, in fine, d’un choix personnel, il ne reste donc à Misrahi qu’à l’analyser pour ce qu’il est : une posture propre à son auteur, influencée mais non déterminée par le contexte dans lequel il évolue. Partant, dans le dernier chapitre du livre, il s’agit de démontrer que l’origine de l’antisémitisme de Marx, « c’est Marx lui-même » (p. 219). Pour cela, Misrahi étudie deux sources propres au philosophe : la relation au père et celle à Moses Hess, premier communiste hégélien et juif. La relation au père tout d’abord, à ce père juif émancipé, puis converti au luthéranisme : c'est de cette culpabilité que le jeune Marx souhaiterait ainsi se purger dans son texte de 1844. Autrement dit, sa haine du Juif ne serait « rien d’autre que la justification par intériorisation et assomption, de l’exemple donné par le modèle, le père de Marx, converti au protestantisme au milieu des pogroms antisémites » (p. 228). Cette culpabilité serait d’autant plus grande que Marx avait face à lui, en miroir, la figure de Moses Hess, qui incarnait alors la synthèse de l’être communiste et de l’être juif. En sus de ce qui a été dit à propos du père, l’antisémitisme de Marx est lors une « justification forcée de l’antijudaïsme et de la conversion du père au protestantisme […] rendue nécessaire aux yeux de Marx par la seule présence active de Moses Hess, son inspirateur et anti modèle. » (p. 231). Ce serait ainsi plus à Hess qu’à Bauer que Marx répondrait dans « Sur la question juive ». Ce serait donc pour se purger de cette double culpabilité, fruit de la conversion du père, que Marx aurait connu cette « crise » antisémite.
Un dernier élément, enfin, à ajouter à cette surdétermination causale : la prise en compte du lectorat de la revue dans laquelle le texte de 1844 était publié. Il s’agirait, aux dires de Misrahi, d’un « public socialiste antisémite » qui dicterait le traitement à réserver aux Juifs, public duquel Marx cherchait à se faire aimer, par le biais de ce que l’on appellera plus tard la haine de soi.
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Le judaïsme : du peuple-classe à l’impensé
Que retenir au terme de cette lecture ?
Misrahi invite ses lecteur·ices à affronter un problème majeur et que je reprends ici : quel regard la gauche porte-t-elle sur les Juifs ? Quelle place leur accorde-t-elle dans ses luttes sociales ? L’antisémitisme est-il présent de manière structurelle ou bien circonstancielle ? Autant de questions qui en ouvrent une autre : existe-t-il un antisémitisme de gauche, ou bien à gauche ?
Avec l’exemple de Marx – qui dépasse d'ailleurs le simple statut d’exemple tant il est édifiant – Misrahi montre qu’en réduisant le judaïsme à une religion elle-même associée à l’argent et au capitalisme, on peut arriver à des dérives antisémites, comme le révèle sa lecture de « Sur la question juive ». L’intérêt toujours actuel de ce texte, c’est de mettre en lumière cet aspect de la pensée de gauche qui reste l’expression d’un impensé, celui du devenir des Juifs comme minorité, et du traitement ambigu du judaïsme. En effet, chez Marx lu par Misrahi, l’émancipation des Juifs ne peut suffire à effacer les particularités propres au judaïsme. Autrement dit, la minorité juive ne pourrait être intégrée qu’à condition de supprimer le judaïsme lui-même. On est bien loin des revendications des maskilim qui, déjà avec Moses Mendelssohn, demandaient le droit à l’égalité assorti d’un droit à la différence⁹. C’est ce dernier que nie la pensée du Marx de 1844.
À cette lecture, on pourrait opposer à Misrahi, du côté des études contemporaines sur le texte de Marx, celle de Daniel Bensaïd¹⁰ pour qui Marx tente d’introduire dans le débat la possibilité d’une émancipation qui irait au-delà des droits politiques. Cette émancipation inclurait aussi les questions religieuses et sociales : notre auteur voit dans l’hypothèse marxienne, celle du dépassement du judaïsme comme « particularité », des marqueurs antisémites (la réduction à l’argent et à la religion) qu’on ne peut plus ignorer. Il me semble que Bensaïd reste du côté du déni, en ce qu’il n’affronte pas l’impensé.
Une telle étude montre que la critique de Misrahi reste pertinente, parce que celle-ci propose justement cette mise au jour d’un impensé propre à la gauche et qui se manifeste par l’adhésion, même involontaire, à une imagerie antijuive, à défaut d’être antisémite.
En outre, là où l’étude de Misrahi excelle, c’est dans le traitement des contradictions de Marx, chez qui le « Juif » incarne une figure ambivalente : d’un côté, il est le produit d’une aliénation historique, celle du juif à la religion, au point de nuire à son assimilation dans les sociétés modernes ; de l’autre, il sert de point de départ pour une critique du capitalisme. Misrahi souligne ici un paradoxe crucial : en tentant d’abolir toute spécificité en faveur de l’universalisme du prolétariat, Marx reproduit une violence à tout le moins symbolique envers les minorités qui ne sembleraient pas pouvoir s’y conformer. Pour Marx, si le judaïsme a perduré, c'est parce qu’il n’est pas assimilable. Or, s’il n’est pas assimilable, il doit donc être supprimé. En écho à l’analyse de Hannah Arendt sur l’antisémitisme¹¹, Misrahi s’interroge sur le rôle du judaïsme comme miroir des fractures européennes. Mais contrairement à Arendt, il ne fait pas du Juif un simple bouc émissaire en partie responsable des persécutions qu’il subit : il montre comment Marx, malgré lui, inscrit l’identité juive au cœur d’un dilemme politique et social, du traitement de la minorité, à savoir la considérer dans son irréductibilité avec tout ce que cela pourrait impliquer : l’intégrer comme telle ou la supprimer parce que telle.
Une contribution critique à amender
Misrahi ne se contente pas d’interpréter Marx. Il interroge la pertinence de l’analyse marxienne (mais non marxiste¹²) dans une époque où les identités fragmentées défient encore les promesses universalistes de la gauche. Mais son analyse a quelques limites.
L’antisémitisme de Marx après 1844
Un premier écueil apparaît : Misrahi fait preuve d’une certaine indulgence envers Marx, dans la mesure où son interprétation, tout en éclairant les intentions émancipatrices et dangereuses du philosophe, réduit les formulations problématiques, voire antisémites, à un moment de crise passagère, afin d’épargner le marxisme de tout soupçon d’antisémitisme. Pourtant, Misrahi oublie de mentionner que Marx ne s’est jamais récusé lui-même sur ce point. Dans aucun texte postérieur, Marx n'est revenu sur son traitement de la « question juive » ni sur les reprises multiples de l’antisémitisme chrétien dans sa pensée. On peut donc s’interroger sur la contingence de l’explication psychologique.
Ce qui soulève en outre une autre question : la non-mention du « Juif » ou du « judaïsme » dans les textes postérieurs suffit-elle à dédouaner son auteur et sa pensée de tout antisémitisme, alors que celui-ci s’avère être manifeste – aux dires de Misrahi – dans un texte qui, par ailleurs, se consacre également à l’établissement de sa théorie de l’État ? Le matérialisme historique, forgé par les jeunes hégéliens socialistes, ne souffrirait-il pas d’un antisémitisme silencieux ? Cela pourrait dès lors justifier l’expression « antisémitisme de gauche », c’est-à-dire d’un antisémitisme qui serait inhérent à une certaine pensée à gauche. Pourtant, il n’en est rien et, alors que Misrahi récuse un antisémitisme structurel dans la pensée de gauche, il en maintient la particule « de », laissant penser qu’il y aurait pourtant quelque chose qui, dans la théorie politique de la gauche, serait antisémite, au moins potentiellement.
Un antisémitisme propre à la gauche ?
En effet, l’expression « l’antisémitisme de gauche » employée par l’auteur ne trouve pas véritablement de justification dans le livre, en ceci que ses causes demeurent hétérogènes à la gauche – à savoir l’antisémitisme chrétien. Autrement dit, dans l’étude de Misrahi, rien ne permet d’entrevoir un antisémitisme propre à la gauche. Si celui-ci correspond à des thèmes économiques et anticapitalistes, comme le précise par ailleurs Patrick Cabanel¹³, il ne faut pourtant pas oublier que les préjugés véhiculés par cet antisémitisme n'ont rien de nouveau : ils puisent largement dans l’imaginaire antijuif chrétien actualisé dans le contexte de la révolution industrielle. Autrement dit, ces préjugés sont ceux promus par les monarchistes catholiques à la même époque. À cela s’ajoute le fait qu’à chaque fois que Misrahi parle de « l’antisémitisme de gauche », ce sont des personnes qui sont mises sur le banc des accusés (Marx, Toussenel ou encore Proudhon) et non des concepts forgés par la gauche, comme pourrait l’être celui de « peuple-classe » à travers l’assimilation du judaïsme à la bourgeoisie, et qui auraient, dans leurs caractéristiques intrinsèques, quelque chose d’indéniablement antisémite. Ainsi, rien ne permet de faire de cet antisémitisme une caractéristique de la gauche.
Un antisémitisme à gauche
Ainsi, au terme de la lecture de ce livre, c’est plutôt vers un antisémitisme à gauche que l’on est invité à se tourner : être de gauche ne suffit pas pour être immunisé contre la haine de l’autre, et du Juif en particulier. La présence de l’antisémitisme à gauche a notamment été étudiée par l’historien Michel Dreyfus¹⁴. Pour ce dernier, il s’agit de mettre en lumière le fait que la gauche, elle aussi, et en dépit des idéaux qu’elle promeut, est perméable, même temporairement, au climat antisémite européen. Finalement, c’est aussi cela que fait Misrahi, en osant penser ce qui était un impensé et qui peut se résumer en ces termes : l’antisémitisme est apolitique et a mille visages. On peut le retrouver aussi bien à droite (ce qui est évident, surtout après 1945) qu’à gauche.
Aussi, Michel Dreyfus met au jour le processus de création et de diffusion de l’antisémitisme, qui, quoique né à droite et surtout à l’extrême droite, peut trouver des porte-voix à gauche. Il distingue plus précisément trois phrases distinctes : une première, de 1830 à 1881, au cours de laquelle certains socialistes, à l’instar de Marx, associent les Juifs au capitalisme et à la bourgeoisie. La seconde phase, qui commence à partir des années 1880, s’adapte à la montée des nationalismes et voit une partie de la gauche adopter des préjugés antisémites basés sur des théories raciales. La dernière phase est celle du tournant marqué par l’affaire Dreyfus : la société française et européenne est à ce point divisée que chacun est amené à prendre position pour ou contre Dreyfus. C’est à ce moment que la gauche décide de rejeter ouvertement l’antisémitisme. Et c’est là que la gauche innove en exprimant ce qui fait partie de son essence, lorsque sa conception de l’universel n’exclut pas mais, au contraire, prend fait et cause du cas particulier d’Alfred Dreyfus au nom de l’humanisme.
Et aujourd’hui ?
Partant, l'œuvre de Michel Dreyfus enrichit la critique de Marx par Misrahi en fournissant un contexte historique détaillé des manifestations et des expressions de l'antisémitisme au sein de la gauche française. Elle met en lumière les contradictions contingentes entre les idéaux de la gauche et les préjugés antisémites qui ont pu les entacher, offrant une perspective historique essentielle pour comprendre les défis contemporains liés à l'antisémitisme dans les mouvements de gauche. Aussi, en philosophe, Misrahi nous aide à percevoir l’antisémitisme d’une partie de la gauche comme un impensé. Cette même gauche qui, aujourd’hui, masque son antisémitisme derrière une perspective antisioniste de type décolonial et qui a souvent fait preuve de silence quant à l’enjeu de la lutte contre l’antisémitisme¹⁵, en l’ensevelissant sous la question de « l’instrumentalisation de l’antisémitisme ». Son silence est devenu assourdissant depuis le 7 octobre.
Pourtant, au terme de ma lecture de Misrahi, des questions demeurent sans réponse, montrant par là son besoin d’actualisation philosophique : comment expliquer aujourd’hui ce silence d’une partie de la gauche radicale sur la lutte contre l’antisémitisme qui, depuis quelques années, s’est trouvée investie à droite, voire – non sans une ironie cruelle – à l’extrême-droite ? L’antisémitisme, déguisé en antisionisme, n'est-il encore qu’une contingence, au même titre que l’antisémitisme de Toussenel ou de Marx ? À ce titre, l’interrogation qui s’ouvre est de savoir quels facteurs explicatifs cette expression de l’antisémitisme à gauche est susceptible de recevoir. Un tel questionnement permettrait sans doute de mieux déterminer les rapports à établir entre perspective décoloniale et antisémitisme, soit dans le sens d’une corrélation fermant la voie à cette perspective, soit au contraire dans une décorrélation la rendant audible.
Rivka DLB enseigne la philosophie au secondaire et à l’Université. Ses recherches portent principalement sur la philosophie de Spinoza et de Mendelssohn. Elle s’attache notamment à étendre les narratifs traditionnels de l’histoire de la philosophie, en incluant les corpus émanant de penseur.euse.s juif·ve·s. Avant son doctorat, elle a également travaillé comme collaboratrice politique à gauche. Un autre de ses champs d’intérêt concerne le regard porté par les partis de gauche sur les Juif·ve·s, en France et en Europe. Cet axe s’est particulièrement intensifié après le 7 octobre, avec la volonté de faire entendre une parole de gauche, mais également d’interroger les réactions contrastées, voire antisémites, d’une partie de la gauche.
Theodor W. Adorno, Minima Moralia. Réflexions sur la vie mutilée (1951), traduit de l’allemand par É. Kaufholz et J.-R. Ladmiral, Paris, Payot & Rivages, 2003, p. 74.
Robert Misrahi, Marx et la question juive, Paris, Gallimard, 1972.
Zur Judenfrage en allemand. Texte rédigé en 1843 et publié en 1844 dans la revue Deutsch-Französische Jahrbücher. Le texte de Bruno Bauer était quant à lui intitulé Die Judenfrage (La Question juive), publié en 1843.
Le concept de « peuple-classe » sera développé par Otto Bauer, puis par Abraham Léon. Ce dernier explique à l’aide de ce concept comment, d’un point de vue matérialiste et historique, le judaïsme s’est maintenu malgré la dispersion et les persécutions.
Cf. La conception matérialiste de la question juive, 1940-1944. À la question juive, Abraham Léon apporte la réponse suivante : mettre fin au peuple classe, grâce au socialisme qui « doit donner aux Juifs, aussi bien qu'il le fera pour tous les peuples, la possibilité de s'assimiler comme la possibilité d'avoir une vie nationale particulière. […] Le socialisme, dans le domaine national, ne peut qu'apporter la démocratie la plus large. Il doit donner aux Juifs la possibilité de vivre une vie nationale dans tous les pays où ils habitent; il doit également leur fournir la possibilité de se concentrer sur un ou plusieurs territoires sans léser naturellement les intérêts des indigènes. Seule, la plus large démocratie prolétarienne peut permettre de résoudre le problème juif avec le minimum de souffrances. »Misrahi utilise l’expression d’antisémitisme chrétien, plutôt que d’antijudaïsme chrétien. Par souci de cohérence avec les citations de son livre, on utilisera la première expression, même si la seconde devrait être de mise.
Ces émeutes sont des pogroms qui ont eu lieu contre les Juifs allemands, à partir du 2 août 1819 à Wurzbourg. Elles se sont étendues jusqu’au Danemark, en Pologne, en Lettonie et dans le royaume de Bohême. Le sens de l’expression « hep hep » reste sujette à débat: on y a vu le cri de ralliement des croisés lorsqu’ils attaquaient des Juifs, dérivé de l’expression « Hierosolyma est perdita » (« Jérusalem est perdue »); ou bien la contraction d’« Hebräer ». Les frères Grimm, dans leur dictionnaire de la langue allemande (commencé en 1838), expliquent qu’il s’agirait d’une manière d’appeler les chèvres appliquée aux Juifs à cause de leur barbe.
Fortement influencée par les Lumières (françaises et allemandes), la Haskala (littéralement sagesse, érudition, ou éducation) correspond aux Lumières juives allemandes. Ses membres sont appelés les maskilim (au singulier maskil, qui signifie érudit ou homme éclairé). Leur combat visait principalement la réforme de l’éducation traditionnelle des Juifs et l’égalité des droits. Moses Mendelssohn est considéré comme l’un des fondateurs de ce mouvement, avec Hartwig Wessely et David Friedländler.
Cette exclusion des Juifs du prolétariat a été reprise en partie par Abraham Léon, qui développe par ailleurs une pensée antisioniste – et non antisémite –, dans le cadre d’un débat qui opposait l’internationalisme et le sionisme.
À la demande de Moses Mendelssohn, Christian Wilhelm von Dohm rédige Über die bürgerliche Verbesserung der Juden (De la réforme politique des Juifs), paru en 1791. Il s’agit d’une défense des Juifs d’Alsace et d’un appel à l’émancipation de tous les Juifs. L’essai aura un écho favorable auprès de nombreux philosophes des Lumières, des deux côtés du Rhin.
Daniel Bensaïd, Sur la question juive, Paris, La Fabrique, 2006.
Hannah Arendt, Sur L’antisémitisme, Paris, Calmann-Lévy, (Nouvelle édition), 2005.
L’adjectif « marxien » qualifie ce qui est propre à Marx, tandis que « marxiste » renvoie au marxisme, courant de pensée issu de Marx sans lui être identique.
Notice de Patrick Cabanel dans l’encyclopédie L’histoire juive de France, dirigée par Sylvie-Anne Goldberg, publiée chez Albin Michel en 2023. Dans cette notice, il défend l’expression d’un « antisémitisme de gauche » en reprenant peu ou prou les arguments de Misrahi.
Michel Dreyfus, L'antisémitisme à gauche. Histoire d'un paradoxe, de 1830 à nos jours, Paris, La Découverte, rééd. augmentée 2011.
La question du silence autour de l’antisémitisme dans la gauche a notamment fait l’objet d’un article dans la revue Vacarme, sous le titre « Le non-sujet de l’antisémitisme à gauche ».
En outre, dans Peuple juif ou problème juif ? (Paris, Maspero, 1981), Maxime Rodinson montre comment le conflit au Proche-Orient a favorisé l’émergence d’une judéophobie dans le monde arabe et chez ceux qui soutiennent la cause palestinienne.
Par ailleurs, pour exemple, je cite quelques vidéos du site Akadem sur les rapports entre la gauche et l’antisémitisme, datant d’avant le 7 octobre 2023 :
« L’impensé de l’antisémitisme à gauche », 9 décembre 2021.
« Cachez cet antisémitisme que je ne saurai voir », 10 juin 2022.
« Les silences coupables de la gauche », 17 février 2022.Enfin, la Revue K a enfin consacré un dossier consacré à ce sujet le 17 juillet 2023.